Par Sarah HobbsDG de l’Alliance pour des communautés en santé

Alors que nombreux sont ceux qui font valoir leurs perspectives quant aux soins de santé en ce moment, toutes les personnes au Canada peuvent certes s’entendre sur une chose : le statu quo ne fonctionne pas et des changements sont requis. La conversation sur les solutions potentielles commence à évoluer en ce qui concerne l’accès à un médecin de famille ou à un membre du personnel infirmier praticien, et à une équipe de soins de santé primaires, et nous avons maintenant besoin d’engagements de tous les gouvernements pour que les soins de santé primaires soient véritablement le fondement des systèmes de santé au Canada. Comment pouvons-nous y arriver? À quoi cela ressemblerait-il?

Ces jours-ci, il ne fait aucun doute pour les personnes habitant au Canada qui n’ont pas accès à un médecin de famille ou à un membre du personnel infirmier praticien, ou pour celles qui sont sur le point de le perdre à cause d’un départ à la retraite ou d’un manque de personnel, que d’avoir un quart-arrière en charge de leur santé n’est pas un luxe; il s’agit d’un élément incontournable du bien-être, du vieillissement en santé et de la prévention des maladies physiques et mentales. Bien entendu, ce qui est encore mieux qu’un quart-arrière fiable, c’est l’accès à toute une équipe : d’autres médecins de famille et membres du personnel infirmier praticien qui assurent la relève lors des vacances, des congés parentaux et du départ à la retraite de cliniciens pour qu’il n’y ait aucune interruption des soins. Il faut aussi un accès coordonné à d’autres membres de l’équipe de soins de santé primaires, comme le personnel infirmier, les travailleurs sociaux, les diététistes, les pharmaciens, les physiothérapeutes et les promoteurs de la santé. Ces soins peuvent changer la vie des patients. Les prestataires, quant à eux, peuvent passer plus de temps à faire ce qu’ils font de mieux, c’est-à-dire prendre soin des patients.

En vertu de l’entente de financement en matière de soins de santé entre Ottawa et l’Ontario qui vient tout juste d’être annoncée, l’Ontario recevra 74 milliards de dollars du gouvernement fédéral sur 10 ans pour les services de soins de santé. De ce montant, 8,4 milliards de dollars serviront à respecter des engagements d’un nouvel accord bilatéral axé sur quatre domaines prioritaires communs en matière de soins de santé. 

La première de ces priorités est un accès à des services de santé familiale de grande qualité lorsque les patients en ont besoin, y compris dans les régions rurales et éloignées et les collectivités mal desservies. 

Nombreuses sont les personnes au Canada qui poussent un soupir de soulagement collectif en voyant leurs gouvernements montrer qu’ils comprennent que toutes les personnes ont besoin d’un fournisseur de soins de santé de confiance, notamment pour leurs besoins de base en matière de santé, lors d’une crise comme une pandémie, pour la gestion des maladies chroniques, ou pour un aiguillage vers des soins de santé mentale.

Pour les personnes qui font face aux plus importants obstacles à la santé et qui sont les plus susceptibles de maladies chroniques, l’accès à une équipe de santé communautaire locale peut faire la différence entre la vie et la mort.

Les centres de santé communautaire, qui ont été établis par le système de santé de l’Ontario et qui apportent des innovations au Canada depuis plus de 50 ans, engendrent de meilleurs résultats pour les personnes qui ont les besoins les plus complexes en matière de soins de santé et de services sociaux, aidant ainsi toutes les personnes au Canada en évitant des pressions additionnelles sur les systèmes de soins aigus, de soins de longue durée et de soins à domicile.   

II est encourageant de constater que le plan de soins de santé de l’Ontario qui a récemment été publié accorde 30 millions de dollars pour l’expansion de ces types de soins de santé dispensés en équipe. C’est un très bon début. Cependant, nous devons veiller à en faire suffisamment pour joindre chaque personne en Ontario et pour ne laisser aucune communauté pour compte.   

Avec ces 8 milliards de dollars en nouveau financement, l’Ontario doit saisir l’occasion pour s’engager de manière concrète à faire des soins de santé primaires communautaires et dispensés en équipe le fondement d’un système de santé qui garde les personnes en santé et dans leur domicile et leur collectivité. Pour ce faire, il faut soutenir et élargir les équipes actuelles et en établir de nouvelles là où le besoin se fait le plus sentir.

Un autre élément important des soins dispensés en équipe est le lien direct à l’équité en santé et la capacité à veiller à ce que les personnes qui font face à des obstacles à la santé et au bien-être, qui sont plus susceptibles de maladies aiguës et de maladies chroniques, ne tombent pas à travers les mailles du filet. Nous savons que lorsque les personnes tombent à travers les mailles, notre système de soins aigus, notre système d’urgences et le tissu de notre société commencent à s’écrouler. Nous pouvons faire mieux, nous devons faire mieux, et nous savons comment y arriver.

Nous savons qu’un accès élargi à des soins de santé dispensés en équipe régis par la communauté est requis pour favoriser la santé des Autochtones; des francophones; des personnes vivant dans les communautés rurales, les communautés éloignées et les communautés du Nord; des Noirs; et des personnes 2SLGBTQ+. En Ontario, les modèles de soins dispensés en équipe comme les centres de santé communautaire, les organisations de soins de santé primaires autochtones et les cliniques dirigées par du personnel infirmier praticien servent des patients dont les besoins sont 70 % plus complexes que la moyenne. En dépit de cette complexité, ces modèles permettent au système de soins aigus d’épargner 27 millions de dollars par année. L’adaptation des soins de santé communautaire aux besoins particuliers des communautés engendre de meilleurs résultats. Les études ont montré à maintes reprises que les soins dispensés en équipe qui font appel à une approche holistique qui tient compte de la réalité culturelle des patients peuvent changer les choses considérablement pour la vie des personnes, pour le travail des fournisseurs de soins, et pour l’ensemble du système de santé en ce qui concerne les maladies chroniques et l’utilisation du système.

Le moment est venu de faire preuve d’audace en Ontario et ailleurs au Canada afin de faire la prestation de meilleurs soins de santé de manière plus équitable. Nous devons montrer de la créativité et de l’innovation et suivre les données prouvant que les soins de santé primaires communautaires et dispensés en équipe engendrent de meilleurs résultats en matière de santé, particulièrement pour les personnes qui font face à des obstacles. Nous savons que c’est de cette façon que nous garderons plus de personnes en dehors des hôpitaux, leur permettant ainsi de vivre dans leur communauté et de vivre plus longtemps en santé.